L’ombre du doute

C’était un jour comme les autres, ou presque. Camille se tenait devant la fenêtre du salon, regardant fixement la ruelle baignée par la lueur dorée de l’automne. Son esprit était agité, une vague de pensées incertaines la submergeait. Depuis quelques semaines, elle percevait des écarts, de petites choses qui n’avaient pas de sens, comme si les pièces du puzzle de sa vie avec Thomas refusaient soudainement de s’assembler.

Tout avait commencé avec une absence. Un samedi après-midi, alors qu’ils avaient prévu de visiter une galerie d’art ensemble, Thomas avait annulé à la dernière minute. « Un imprévu au travail », avait-il dit, mais son ton manquait de conviction. Camille s’était dit que c’était une fois de plus ces projets professionnels qui accaparaient son partenaire, mais une voix intérieure, familière et insistante, lui susurrait qu’il y avait plus que ce qu’il voulait bien admettre.

Les jours suivants, elle avait noté d’autres anomalies. Des appels discrets auxquels il répondait en s’éloignant, des e-mails sur son ordinateur qu’il fermait rapidement en la voyant entrer dans la pièce. Camille avait choisi de ne pas poser de questions, essayant de maîtriser cette curiosité qui la poussait à douter. Elle se raccrochait à leur quotidien, à ces moments où ils riaient ensemble en cuisinant ou regardaient un film enlacés sur le canapé.

Mais le doute avait planté sa graine, et il croissait à chaque instant de silence. Un matin, tandis qu’elle fouillait dans le tiroir à la recherche de la télécommande, elle était tombée sur une vieille photo d’eux. Ils semblaient si heureux, insouciants. Camille s’était mise à pleurer, submergée par une nostalgie douloureuse. Était-ce tout cela qu’elle était en train de perdre?

Une semaine plus tard, Thomas rentra tard, plus tard qu’à son habitude. Il sentait le vent frais et le parfum floral d’un lieu inconnu. Camille, assise à la table de la cuisine, feuilletait un magazine sans vraiment le lire. « Comment s’est passée ta journée? » demanda-t-elle, cherchant à capter son regard.

« Épuisante », répondit-il, en enlevant sa veste, évitant son regard. Il se dirigea vers la salle de bain, se murant aussitôt dans le silence. Camille sentit son cœur se serrer, son instinct criant à l’injustice. Elle ne pouvait plus supporter ce flou, cette distance qui s’insinuait entre eux.

Le choc survint pendant une soirée qu’ils passaient chez des amis communs. Camille, en compagnie de Sophie, une amie proche, discutait de tout et de rien lorsque Sophie mentionna innocemment avoir vu Thomas dans une librairie le jour même. « Il était avec une femme, ils semblaient bien se connaître », avait-elle ajouté, sans se douter de l’impact de ses mots.

Soudain, tout se mit en place dans l’esprit de Camille. La galerie annulée, les appels mystérieux, les absences répétées. Elle sentit l’air lui manquer, le sol se dérober sous ses pieds. L’image d’une trahison s’imposa à elle, un mensonge enroulé autour d’elle comme une corde invisible.

Camille décida d’affronter Thomas. Elle attendit qu’ils soient rentrés chez eux, dans l’intimité silencieuse de leur appartement. « J’ai besoin de te parler », dit-elle, sa voix tremblante mais déterminée.

Thomas s’assit, l’air fatigué et résigné. Leurs regards se croisèrent, et elle y lut une vérité qu’ils avaient tous deux évitée. « Je sais ce que tu me caches, Thomas. Je sais pour la femme que tu as vue aujourd’hui. »

Il soupira, un poids immense semblant glisser de ses épaules. « C’est ma sœur, Camille. Je ne savais pas comment te le dire. Elle est revenue après des années d’absence, nous étions fâchés… »

Le souffle de Camille se suspendit, entre soulagement et colère. Elle se sentit coupable d’avoir imaginé le pire, mais aussi trahie par cet écart de confiance. Elle était prête à comprendre, à accepter, mais savait que tout ne serait plus jamais pareil.

La tension se dissipa progressivement, révélant une nouvelle réalité. Ils s’embrassèrent en silence, une promesse muette de reconstruire sur des bases plus solides. Camille avait trouvé sa vérité, mais l’apprentissage de la confiance était loin d’être terminé.

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