L’écho des souvenirs

Elle se tenait debout sur le quai, fixant les vagues qui léchaient doucement la rive, emportant et ramenant les coquillages avec une régularité apaisante. La mer avait toujours été son refuge, un lieu où les pensées pouvaient se dérouler naturellement, sans jugement. Elle avait passé tant d’étés ici, dans cette petite ville balnéaire où tout le monde connaissait tout le monde. C’était là qu’ils s’étaient rencontrés, deux enfants insouciants qui avaient partagé des rires et des secrets sous le soleil éclatant.

Les années avaient filé, emportant avec elles leur insouciance, transformant les rires en souvenirs flous. Elle avait quitté la ville pour poursuivre ses rêves, et lui, il était resté, construisant sa vie autour des choses familières. Leurs chemins s’étaient séparés, chaque pas les éloignant un peu plus. Pourtant, elle revenait chaque été, comme pour retrouver une partie d’elle-même laissée ici.

Ce matin-là, alors qu’elle se promenait le long de la plage, elle aperçut une silhouette familière parmi les pêcheurs matinaux. Son cœur fit un bond inattendu, une vague de nostalgie la submergeant. C’était lui, plus âgé, les traits émoussés par le temps, mais indéniablement lui. Elle hésita un instant, incertaine de l’opportunité de se manifester après tant d’années.

Puis, comme animée par une force silencieuse, elle s’approcha. Il leva les yeux et leurs regards se croisèrent, un mélange d’incrédulité et de reconnaissance les traversant. « Marie? » Sa voix était douce, presque timide, comme s’il craignait de rompre l’illusion.

« Oui, c’est moi », répondit-elle, un sourire timide éclairant son visage. Ils restèrent là, à se regarder, un silence lourd de ce qui avait été et de ce qui aurait pu être s’étendant entre eux.

Après un moment, ils commencèrent à marcher le long de la plage, les mots venant lentement, hésitants au début. Les banalités sur le temps, les familles, la vie se succédèrent, mais chaque phrase était un pont qui les ramenait l’un à l’autre. Peu à peu, la gêne initiale s’effaça, laissant place à une complicité retrouvée.

Ils parlèrent des jours passés dans leur cabane secrète dans les dunes, des nuits étoilées passées à rêver de mondes lointains. Ils évoquèrent les rêves qu’ils avaient partagés et ceux qu’ils avaient réalisés. Leurs rires résonnèrent à nouveau, légers, libérateurs.

Mais dans les pauses entre les mots, il y avait autre chose, un écho de douleur non exprimée. Elle se risqua enfin à poser la question qui pesait sur son cœur depuis leur rencontre. « Pourquoi avons-nous cessé de nous parler? »

Il soupira, regardant la mer comme pour y chercher des réponses. « La vie, je suppose. Les chemins se séparent, on ne sait jamais comment ou pourquoi. J’ai souvent pensé à te contacter, mais… » Il haussa les épaules, impuissant face au poids des années de silence.

Elle hocha la tête, comprenant sans qu’il ait besoin d’en dire plus. Elle aussi avait laissé la vie s’interposer. Loin des clichés, il n’y avait ni reproches ni regrets exprimés, juste une acceptation de ce qu’ils étaient devenus.

Ensemble, ils observèrent le soleil descendre à l’horizon, teintant le ciel de nuances d’orange et de rose. Leurs mains se trouvèrent, non par nécessité, mais par un désir partagé de se sentir connectés, ici et maintenant.

Le crépuscule apporta avec lui une paix inattendue, une réconciliation silencieuse avec les années perdues. Ils étaient deux âmes qui avaient dérivé, mais qui, en cet instant, étaient revenues au même port.

Alors qu’ils se levaient pour partir, elle sut qu’ils se reverraient. Peut-être pas demain, ni même l’année prochaine, mais à un moment où leurs chemins se croiseraient à nouveau, toujours guidés par le doux murmure de la mer.

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