Elle ne pensait jamais revoir sa mère, jusqu’à ce matin ordinaire où une lettre est arrivée, portant une adresse familière et une écriture qu’elle n’avait pas vue depuis des décennies. Camille vivait avec une douleur non résolue, une question silencieuse qui hantait ses nuits : pourquoi sa mère était-elle partie, laissant derrière elle une famille en morceaux ?
La lettre était courte, presque timide, demandant une rencontre dans le café à l’angle de la rue. Camille froissa le papier, un mélange de colère et de curiosité l’envahissant. Elle se souvenait des disputes, des cris et des portes qui claquent, mais aussi des moments de tendresse rare, comme lorsque sa mère lui lisait des histoires avant de s’endormir.
Deux jours plus tard, elle se trouvait devant le café, hésitant à pousser la porte. À l’intérieur, une femme aux cheveux grisonnants, mais avec les mêmes yeux déterminés, levait les yeux à son entrée. “Camille,” murmura-t-elle, la voix emprunte d’une vulnérabilité inattendue.
“Maman,” répondit Camille, la gorge serrée. Elle s’assit face à elle, un silence épais s’installant entre elles.
“Je sais que j’ai beaucoup à expliquer,” commença sa mère, ses mains tremblantes sur la table. “Je ne suis pas partie parce que je ne vous aimais pas. C’était… compliqué.”
Camille écoutait, se battant contre ses propres larmes. “Et tu penses qu’une lettre suffit après 20 ans ?” demanda-t-elle, une pointe d’amertume dans la voix.
Sa mère hocha la tête, abattue. “Je ne m’attends pas à ce que tu me pardonnes, pas si facilement. Mais j’avais besoin de te revoir, de te dire que je suis désolée.”
Les mots flottaient entre elles. Camille se souvenait des nuits passées à pleurer, des questions sans réponse qu’elle avait posées à son père qui, lui-même, ne comprenait pas. Mais elle se souvenait aussi de la chaleur d’une main maternelle sur son front fiévreux, de l’odeur rassurante de sa cuisine.
Leur conversation fut longue, douce-amère. La colère de Camille s’étiolait en une douleur plus douce, plus triste, alors que sa mère partageait son histoire de regrets et de solitude. “Je ne dis pas que ça excuse tout,” conclut-elle, “mais je veux essayer d’être là maintenant, si tu me laisses une chance.”
Camille soupira, regardant par la fenêtre où le soleil se couchait lentement, peignant le ciel de nuances orangées. Elle ne savait pas si elle pouvait pardonner, mais elle savait qu’elle voulait avancer.
“Je pense que je peux essayer,” dit-elle enfin, sa voix brisée mais résolue.
Sa mère sourit, les yeux brillant d’espoir. “C’est tout ce que je demande.”
Elles quittèrent le café ensemble, une distance comblée par l’espoir, sans promesse de lendemain, mais avec une chance de réconciliation.