Elle n’aurait jamais pensé voir sa sœur à nouveau, jusqu’à ce qu’un matin ordinaire, une lettre soit glissée sous sa porte. Sophie vivait avec un poids constant, une question qui lui hantait l’esprit : Pourquoi sa sœur l’avait-elle abandonnée il y a deux décennies? Elles avaient été si proches, presque inséparables, jusqu’à cette dispute fatidique qui avait fracturé leur relation et les avait laissées sur des chemins séparés. En ouvrant la lettre, son cœur battait à tout rompre. “Je suis en ville, voudrais-tu me voir?” signait Julie, de son écriture familière. Sophie hésitait, tiraillée entre la colère refoulée et un désir inexplicable de renouer.
Le jour de leur rencontre, Sophie se tenait dans leur café d’enfance, une petite boulangerie au coin de la rue où elles avaient passé tant de moments complices. La cloche de la porte tinta, et Julie entra, son visage marqué par le temps mais toujours reconnaissable, ses yeux cherchant immédiatement ceux de Sophie. Elle s’approcha lentement, chaque pas une montagne de souvenirs.
“Bonjour, Sophie,” dit Julie d’une voix douce.
“Bonjour,” répondit Sophie, plus raide qu’elle ne l’avait souhaité. “Pourquoi maintenant, Julie?”
Julie soupira, ses mains tremblant légèrement. “J’ai mis du temps à comprendre à quel point j’ai gâché notre relation. Je voulais te voir, pour m’excuser, et… peut-être commencer à réparer ce qui peut l’être.”
Sophie fronça les sourcils, la tension palpable. “Tu m’as laissée seule à gérer tout ça, Julie. J’ai dû grandir sans toi, et chaque fois que je pensais que tu allais revenir, tu ne l’as jamais fait.”
Les deux sœurs s’assirent, le silence entre elles aussi lourd qu’un orage en attente. “Je sais,” murmura Julie. “À l’époque, je pensais que partir était la meilleure chose à faire. J’étais en colère, blessée, et je n’ai pas su m’arrêter pour penser à toi, à nous.”
Sophie se souvint des jours passés à scruter la boîte aux lettres, espérant une lettre, un mot, une preuve que Julie pensait à elle. Elle secoua la tête, essayant de dissiper les souvenirs douloureux.
“Je ne sais pas si je peux te pardonner, Julie,” avoua Sophie. “Mais je suis prête à essayer. Peut-être que cela prendra du temps, mais je veux croire qu’on peut avancer.” Julie sourit timidement, les mots de Sophie lui offrant un espoir qu’elle n’espérait plus.
Les deux femmes continuèrent à discuter, leurs mots hésitants devenant graduellement plus fluides, comme si elles redécouvraient un langage oublié. Elles parlaient des vieilles histoires, des rêves partagés et des nouvelles réalités, construisant un pont fragile mais prometteur, fait de souvenirs et de promesses.
À la fin de la journée, alors que le soleil se couchait, Julie se leva pour partir. Elle regarda Sophie, incertaine. Sophie fit un pas en avant, hésita, puis la serra doucement dans ses bras. “Merci d’être revenue, Julie.”
“Merci de me donner une chance,” répondit Julie, émue.
Elles se séparèrent, conscientes que le chemin vers la réconciliation serait long, mais elles avaient fait le premier pas.
“On se revoit bientôt?” demanda Julie.
“Oui,” dit Sophie, plus sûre cette fois.
Seule dans le café qui se vidait lentement, Sophie réalisa que même si le passé ne pouvait être changé, l’avenir restait ouvert, plein de promesses et de nouvelles compréhensions.