Elle ne pensait jamais revoir son frère aîné, jusqu’à ce qu’un après-midi ordinaire, elle aperçoive sa silhouette familière à travers la vitre du café où elle travaillait. Claire essuya ses mains nerveusement sur son tablier, son cœur battant la chamade. Vingt ans s’étaient écoulés depuis la dernière fois qu’elle avait vu Marc, vingt ans d’absence inexpliquée et de lettres jamais répondues. Elle hésita un moment, ses pensées se bousculant. Que faisait-il ici ? Que lui dirait-elle ?
La clochette de la porte tinta alors qu’il entrait, l’air hésitant. Leurs regards se croisèrent, et Claire sentit un flot d’émotions la submerger : colère, tristesse mais aussi une pointe d’espoir. Marc s’approcha de la table la plus proche, s’arrêtant devant elle, les mains enfoncées dans les poches de son manteau.
« Salut Claire… » dit-il d’une voix rauque, comme s’il n’avait pas parlé depuis des jours.
Claire déglutit difficilement. « Salut Marc. Je ne m’attendais pas à te voir. »
Il hocha la tête, les yeux fuyant les siens. « Je sais. J’ai longtemps hésité, mais je devais te voir… Parler. »
Le silence entre eux était lourd, rempli de mots non dits et de souvenirs douloureux. Claire se revit à dix-huit ans, attendant Marc qui avait promis d’assister à sa remise de diplôme, mais qui n’était jamais venu. Elle avait passé des années à se demander ce qui l’avait conduit à partir sans explication.
« Pourquoi maintenant ? » demanda-t-elle brusquement, faisant fi des clientèles autour d’eux.
Marc soupira, s’assit et passa une main dans ses cheveux grisonnants. « Parce que je suis fatigué de fuir. Parce que je regrette… d’avoir manqué tant de choses dans ta vie. Je sais que je ne peux pas changer le passé, mais je veux essayer de rattraper le temps perdu. »
« Rattraper le temps perdu ? » répéta-t-elle, amère. « Vingt ans, Marc. Vingt ans sans nouvelle, sans une lettre, sans un mot. »
Elle vit la douleur traverser son visage, une douleur qui reflétait la sienne. Leurs vies avaient bifurqué si brutalement, laissant des blessures béantes.
« Je suis désolé, » murmura-t-il finalement, et elle sentit la sincérité dans ses paroles. « J’étais jeune et stupide. Je pensais que disparaître était la meilleure chose à faire… pour toi, pour moi. Je sais que c’était une erreur. »
Claire se tut, luttant contre ses propres émotions. Elle avait rêvé de cet instant des milliers de fois, mais la réalité était bien plus complexe. Elle voulait hurler, pleurer, mais elle voulait aussi croire en un futur possible avec lui.
« Je ne sais pas si je peux te pardonner, » dit-elle honnêtement. « Pas encore. Mais je suis prête à essayer. »
Marc acquiesça, un léger sourire sur ses lèvres. « C’est tout ce que je demande. »
Ils restèrent assis là, dans le silence, savourant le simple fait d’être à nouveau ensemble. Le café continuait son activité autour d’eux, mais pour Claire et Marc, le temps semblait s’être arrêté, offrant un moment suspendu où tout redevenait possible.
Ils se levèrent finalement et échangèrent une étreinte hésitante mais prometteuse. Leurs chemins s’étaient séparés autrefois, mais ils étaient prêts à tenter la réconciliation.
À cet instant, sous le crépuscule naissant, ils firent un pas vers un avenir incertain mais partagé.