Elle ne pensait jamais revoir son frère. Un après-midi ordinaire, alors qu’elle arrosait ses plantes sur le petit balcon de son appartement, une enveloppe glissa sous sa porte. Elle la ramassa machinalement, mais le nom inscrit dessus la figea. C’était l’écriture de Marc, son frère qu’elle n’avait pas vu depuis vingt ans. Son cœur se serra, un mélange de douleur et d’espoir l’envahissant.
La dernière fois qu’elle l’avait vu, c’était lors d’un orage houleux de mots et de colère. Un malentendu s’était transformé en un gouffre infranchissable. Depuis, le silence avait régné, chacun vivant sa vie de son côté. Julie avait tenté de tourner la page, mais le manque de son frère était une douleur sourde et persistante.
Une semaine plus tard, à la terrasse d’un café, un homme d’une quarantaine d’années, divisé entre appréhension et détermination, se tenait devant elle. “Salut Ju,” dit-il avec une hésitation évidente.
Julie leva les yeux de sa tasse de café. “Marc,” répondit-elle, sa voix à peine plus qu’un murmure.
Les mots échangés furent d’abord empreints de formalité, chacun tâtonnant, comme s’ils dansaient autour d’un trou noir. Les souvenirs affluèrent malgré elles — les étés passés à courir dans les champs, les rires partagés et puis ce soir fatidique où tout avait basculé.
“Je suis désolé, Julie,” finit-il par lâcher. “Je n’aurais pas dû partir comme ça. J’ai laissé la colère me guider.”
Elle serra son mug de toutes ses forces. “Tu es parti et tu m’as laissée seule avec tout ça.”
“Je sais,” admit-il doucement. “Mais tout ce temps, j’ai regretté. Je ne savais pas comment revenir. Peux-tu me pardonner ?”
La question resta suspendue entre eux, lourde de toutes leurs années perdues. Julie sentait la rage et la tristesse s’entrechoquer en elle, mais aussi ce désir tenace de retrouver son frère. Les souvenirs des bons moments, de leur complicité d’antan, se mirent à peser plus lourd que les années de silence.
Elle prit une profonde inspiration. “Je ne sais pas si je peux pardonner tout de suite,” avoua-t-elle. “Mais je veux essayer de te retrouver.”
Marc hocha la tête, le soulagement mêlé d’émotion. “C’est tout ce que je demande. Recommençons petit à petit, si tu es d’accord.”
À cet instant, quelque chose changea. Ce n’était pas un retour complet à ce qu’ils avaient été, mais c’était un début. Un pas vers la réconciliation, vers la possibilité de reconstruire une relation qui leur avait manqué.
Julie sourit timidement. “Allons-nous promener comme avant ?”
Marc lui rendit son sourire, un éclat de leur passé retrouvé dans leurs yeux. Et ensemble, ils quittèrent le café, prêts à redécouvrir ce que signifier être frère et sœur.