Elle n’aurait jamais pensé revoir sa mère, jusqu’à cet après-midi ordinaire où une lettre reposait sur le pas de sa porte. En la prenant, elle sentit une vague de souvenirs et de douleurs refoulées l’envahir.
Sophie regardait la lettre, son cœur balloté entre curiosité et crainte. Son prénom, écrit d’une main tremblante, lui semblait étrangement familier. Vingt ans. Cela faisait vingt ans que sa mère était partie sans un mot.
En ouvrant la lettre, les mots simples et hésitants lui transpercèrent l’âme : « Je suis désolée. Je voudrais te voir. » Son monde bascula à cet instant, ramenant à la surface l’enfant blessée qu’elle avait été.
Le soir venu, elle se tenait devant la maison de son enfance, cette demeure pleine de souvenirs, bons et mauvais. Sa mère l’attendait sur le seuil, le visage marqué par le temps et le remords.
« Bonjour, Sophie », dit-elle d’une voix tremblante.
Sophie resta silencieuse, examinant cette femme qui lui avait tant manqué mais qui l’avait aussi tant déçue. Les mots lui manquaient, piégés par des années de colère et de tristesse.
« Je sais que je n’ai pas d’excuse, » continua sa mère, « mais je veux te parler, te dire combien je suis désolée de t’avoir laissée. »
« Pourquoi maintenant ? Pourquoi après tout ce temps ? » La voix de Sophie était pleine de méfiance mais aussi d’une curiosité qu’elle ne pouvait dissimuler.
Sa mère soupira. « Je pensais que tu serais mieux sans moi. J’avais tort. Et quand j’ai enfin compris, j’avais peur… Peur que tu ne veuilles plus jamais de moi dans ta vie. »
Sophie se remémora les nuits sans sommeil, les questions sans réponse, et les promesses d’enfance jamais tenues. Elle avait grandi avec un vide que rien n’avait jamais pu combler.
Après un long silence, elle demanda : « Et maintenant, que veux-tu ? »
Sa mère secoua la tête. « Juste une chance de te connaître à nouveau. Je sais que je ne mérite peut-être pas ton pardon, mais je veux essayer. »
Le dilemme déchira Sophie. La colère était là, bouillonnante, mais en regardant sa mère, elle vit aussi la sincérité, la brèche d’une humanité partagée.
Finalement, elle murmura : « Je ne sais pas si je peux te pardonner complètement, mais je veux comprendre… enfin essayer. »
Un espoir fragile naquit dans les yeux de sa mère. Elles s’avancèrent l’une vers l’autre, et dans une étreinte maladroite et hésitante, commencèrent à combler le fossé du temps.
Leur avenir restait incertain, mais ce premier pas était fait. Peut-être que le pardon ne serait jamais complet, mais la possibilité était là, flottant, attendant d’être saisie.