Elle ne pensait jamais revoir sa sœur jusqu’à cet après-midi ordinaire où un coup de sonnette retentit à la porte, le fantôme du passé se tenant là, avec un sourire incertain. Camille vivait avec une douleur latente, marquée par les souvenirs d’une enfance partagée puis d’une séparation brutale. La disparition soudaine de Sarah, cette sœur de cœur, avait laissé un vide qu’aucune explication ne semblait combler.
En ouvrant la porte, Camille sentit son cœur battre la chamade, à la fois d’une colère longtemps cultivée et d’un espoir qu’elle n’osait admettre. Sarah, toujours la même, les cheveux peut-être un peu plus courts, les yeux bleus porteurs d’une tendresse familière, lui dit doucement : « Salut, Camille. »
Les mots restèrent en suspens. Sarah, hésitante, brisa le silence avec une question timide : « Je peux entrer ? » Camille, combattant l’envie de claquer la porte, céda à une curiosité irrépressible et se décala, laissant sa sœur entrer dans le hall qui avait autrefois résonné de leurs rires.
« Pourquoi maintenant ? » demanda Camille, la voix tremblante, quand elles furent assises l’une en face de l’autre dans le salon. Sarah baissa les yeux. « J’ai fait des erreurs. À l’époque, j’avais peur… de tout. J’étais jeune, stupide et tellement en colère. Mais chaque jour sans toi était un rappel de ce que je perdais. »
Camille serra les poings, une foule d’émotions se disputant sa raison. « Tu m’as laissée sans un mot, Sarah. J’ai dû expliquer aux autres. Maman pleurait chaque jour pendant des mois. »
Sarah cligna des yeux, chassant une larme. « Je sais. Et je suis désolée. Je ne peux pas changer le passé, mais je suis ici pour essayer de le réparer. »
Le silence régna, pesant, jusqu’à ce que Camille se lève et se dirige vers la fenêtre. Elle se remémorait les jeux dans le jardin, les soirées passées à se confier sous les étoiles. Une part d’elle désirait ardemment retrouver cette complicité perdue. « Je ne sais pas si je peux juste te pardonner, Sarah. Ça ne se fait pas d’un claquement de doigts. »
Sarah se leva, la voix presque chuchotante : « Je ne m’attends pas à ce que tu pardonnes tout de suite. Mais laisserais-tu la porte entrebâillée pour que nous puissions essayer de renouveler ce qui a été brisé ? »
Camille, regardant au-dehors le crépuscule qui peignait le ciel de teintes changeantes, sentit un élan d’espoir. Elle se tourna lentement vers sa sœur. « Peut-être. Mais ça prendra du temps. »
Sarah acquiesça, un sourire fragile illuminant son visage. « Je suis prête à attendre autant qu’il le faudra. »
Elles se tinrent là, deux sœurs séparées par le temps et les erreurs, pourtant unies par l’espoir d’un nouveau départ. Leur étreinte fut timide au début, puis s’intensifia, signe tangible d’un pacte silencieux fait sous le ciel étoilé : reconstruire, pas à pas.
Camille savait que le chemin serait long, mais en cet instant, elle choisit l’espoir. Et ce début était déjà un petit miracle.